Lettre à mon ami(e) paysan(ne) du Cantal
EAN13
9782848196473
Éditeur
Éditions Créer
Date de publication
Langue
français
Fiches UNIMARC
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Lettre à mon ami(e) paysan(ne) du Cantal

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La première question que tu te poses : Pourquoi cette lettre ? Et la seconde
suivra immédiatement : À quel titre ?
Tu me connais par ce que j’ai écrit ! Si je l’ai fait ? J’ai vu disparaître
une civilisation qui était celle de tes parents, civilisation qui venait du
Temps, qui avait sa base dans la campagne profonde, pays où notre monde
s’était ancré.
Je ne suis pas un étranger, un technicien, un individu qui n’a connu que les
Ministères, les bureaux et la théorie. Je suis un des tiens. Je suis né dans
cette campagne aujourd’hui oubliée, dans un hameau d’une simple commune. Nous
étions trois. Mon père paysan de cœur, de sentiment et de passion a vécu dans
ce petit univers qui était son rêve. Ma sœur est restée, mon frère a pris la
suite. Je suis parti parce que c’était mon rôle de partir mais jusqu’à ma
majorité, durant toutes les vacances, durant tout le temps libre, j’ai roulé
derrière le char ou le tombereau, j’ai manié la scie, la bêche, la fourche, la
pioche, le passe-partout, j’ai « donné » le foin dans le pré et calé ce même
foin sous les chevrons de la grange, à brassées, dans une chaleur de four et
au milieu d’une poussière qui, à la longue, me rendait aveugle !

Ton métier, je le connais. Je l’ai pratiqué. Je l’ai subi. Je serais né dans
un autre environnement, j’aurais connu une autre vie. Mais la tienne a été la
mienne et j’en suis fier.

Voilà pourquoi - peut-être ! - tu liras ma lettre. Elle n’est pas là pour
changer ta vie - ce serait trop demander ! - elle est là pour te faire
réfléchir, pour t’aider, pour, au mieux, te tendre la main.
Alors, si tu le veux bien, prenons quelques minutes !
Entrouvrons la porte des souvenirs. Après tout, ils ne sont pas si lointains
et hier est encore là, tout proche, criant d’une vérité que tu as peut-être
connue, sûrement pressentie.
Parce que, vois-tu, si hier n’avait pas été, aujourd’hui, n’existerait pas. Le
temps d’hier conditionne entièrement le temps d’aujourd’hui même si, en
apparence, tout a changé.
Tout ? Sauf les constances et, bien vite, on va mettre le doigt sur ce qui
était la vérité du passé et qui est demeurée celle d’aujourd’hui !
Il est une base, une réalité tout aussi bien universelle que calée dans le
temps : sans le paysan, la vie n’aurait pas existé. On a tendance à
reconnaître - parfois ! - que l’homme de la terre a nourri l’humanité. Quel
que soit le processus employé, depuis ses bras jusqu’aux techniques les plus
avancées, le résultat a été le même. Sans lui, le Monde en serait resté à ses
premiers balbutiements.
Beaucoup ont été imbus de cette vérité, ont pratiqué ce métier par passion,
ont été grands, d’autres l’ont pratiqué par hasard, par nécessité, par
routine.
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