-
Conseillé par o n l a l u7 février 2016
Don Juane égarée à Paris
Marocaine installée à Paris, journaliste, Leïla Slimani se jette pour son premier roman avec une certaine acidité dans un étrange et « bataillen » (de Georges Bataille) "Jardin de l'ogre ". La brutalité du thème – une addiction féminine au sexe -, sinon son originalité pourraient rebuter. Mais l'écrivaine ne s'y complaît pas, elle raconte avec une certaine distance la descente aux enfers de l'héroïne, nommée Adèle, et le combat un peu désespéré du mari de la malade, qui est médecin. Va-t-il enfin essayer de remettre son épouse sur de bons rails, va-t-il pardonner ? Et Adèle montera-t-elle enfin dans le train qui la ramènera au bercail, quand le couple aura quitté Paris avec son enfant ?
Ce qui frappe dans cette histoire, ce n'est pas la répétition d'un schéma, déjà cent mille fois traités depuis Flaubert et Balzac, c'est qu'elle a jailli de la plume d'une émigrée qui devrait être aux antipodes d'une telle problématique. La femme, le mari et « une armée d'amants » : on se croirait aux Folies Bergères ou dans un théâtre de boulevard ! Sauf qu'Adèle ne sait pas vraiment pourquoi elle s'abaisse ainsi dans une sordide et incompréhensible accumulation d'hommes et que son mari, qu'un accident de scooter oblige à remettre en question sa situation, hésite à tout détruire...
Leïla Slimani détaille avec une certaine finesse le mystérieux mal qui afflige Adèle. On dirait presque que la romancière a vécu ce chemin de croix et que ce récit n'est pas le fruit d'un hasard.